Lettre au Maire de Quiberon

ANNE ET CLAUDE GODRECHE
17 RUE DE KERMORVAN
56170 QUIBERON

Monsieur Bernard Hilliet, Maire de Quiberon
Mesdames et Messieurs les Conseillers municipaux
7 rue de Verdun
56170 Quiberon

21 septembre 2016

 

Projet de logements sociaux rue de Kermorvan

Monsieur le Maire,

lors de notre dernière entrevue, vous mentionniez qu’il était dans le pouvoir du maire de bloquer ou de faire modifier un projet si celui-ci tombait sous le coup d’un des articles du PLU, qui impose l’insertion du projet dans l’environnement. Je pense que vous vous référiez à l’article 11 qui est lui-même dans la filiation de l’article R 111-21 du code de l’urbanisme. Je souhaite vous faire part, de façon plus détaillée, des réserves que j’ai émises sur le projet lors de notre entrevue, au regard de ce critère.

Le projet comprend plusieurs bâtiments, de hauteurs variées, entre 10 et 15 mètres, sur une parcelle d’environ 2000 m2, devant comprendre 29 logements. Les bâtiments donnant directement sur la rue de Kermorvan (faisant face aux 13, 15, 17), sont prévus à une distance de 3 mètres de la voie, avec des hauteurs allant de 10 à 13 mètres. Deux entrées/sorties de véhicules sont prévues en face du 17.

S’il existe un consensus sur la nécessité d’une densification du tissu urbain, cela ne peut impliquer une surdensification. Il ne serait pas correct de justifier la haute densité du projet en arguant que la rue de Kermorvan est une rue de centre-ville. Cette dénomination ne reflète pas sa vraie nature qui est d’être une rue appartenant à un quartier résidentiel.

La rue de Kermorvan, dans le tronçon concerné par le projet, est une rue étroite (environ 9 mètres) sans trottoir, qui relie le bourg au village de Kermorvan. Elle est bordée de maisons individuelles, situées à des distances de la rue s’échelonnant de 5 à 16 mètres (en mètres, côté impair : 9, 7, 9, 10, 6, 14, 16 ; côté pair : 7, 9, 5). Ces maisons sont basses (à l’exception de deux maisons situées au 15 et au 17) et en général largement séparées les unes des autres.

Proche de l’école Saint Anne se trouve une chapelle, patrimoine à respecter, visible depuis la rue. Certaines des maisons dans ce tronçon sont répertoriées pour leur qualité architecturale. En particulier notre villa les Coccinelles, située au 17, restaurée par nos soins sur une période de quinze ans, grâce au concours d’une trentaine d’artisans ou entreprises. Cette maison, où Anatole France séjournait, comme en témoignent les photos que j’ai eu l’occasion de vous montrer, était, lors de notre achat en 2001, une ruine insalubre, n’intéressant qu’un promoteur et vouée à la destruction. Cette villa est un des rares vestiges des maisons de style balnéaire dans Quiberon. De nombreux passants ou riverains s’arrêtent pour la contempler ou pour nous témoigner leur admiration pour la rénovation effectuée.

Si un tel projet devait être réalisé, les conséquences seraient les suivantes :
– La forte densité des bâtiments, leur hauteur, leur situation trop près de la voie et l’aspect massif de l’ensemble dénatureraient le quartier et écraseraient les maisons voisines.
– Alors que les maisons faisant face au projet sont à des distances de 7 à 10 mètres de la voie, la distance prévue de 3 mètres pour les immeubles du projet donnant sur la rue engendrerait une dissymétrie disharmonieuse et soulignerait l’étroitesse de la rue.
– La chapelle Sainte Anne disparaîtrait de la vue des riverains et des passants.
– Il en irait de même de la villa les Coccinelles que nous nous verrions obligés, pour des questions d’intimité (les constructions lui faisant face étant situées à une vingtaine de mètres), d’isoler par un rideau d’arbres, entre sa façade sud et le mur de clôture.
– Une grande quantité de logements induit proportionnellement une grande quantité de voitures et donc un surcroît de circulation dans une rue qui souffre déjà d’une circulation anormalement élévée, alors qu’à la fois la municipalité et les riverains s’entendent sur la nécessité d’une circulation douce dans cette rue. Les entrées/sorties de parking créeraient inévitablement des mini-bouchons.

Je sollicite donc que vous demandiez une révision du projet, qui le rende moins agressif, à la fois pour les riverains, pour les utilisateurs de la rue et pour la beauté du quartier, par
– une diminution du nombre de logements,
– un abaissement de la hauteur des bâtiments,
– une augmentation de la distance des bâtiments à la voie.

Alléger le projet profiterait
– aux riverains dont le cadre de vie serait préservé,
– aux utilisateurs de la rue,
– au quartier qui conserverait son identité, au lieu d’être modifié par un ensemble qui aurait toute chance d’être ressenti comme une cité HLM,
– aux futurs résidents du projet, qui bénéficieraient d’un cadre de vie plus aéré et qui souffriraient moins de la proximité de la voie et seraient moins exposés au flux élevé de voitures et de camions.

Pour mémoire, j’avais suggéré qu’un trottoir soit créé entre l’école Sainte Anne et le futur ensemble en empiétant sur celui-ci. Je suis heureux que cette suggestion ait retenu l’attention de la municipalité.

Les années 60-70 nous ont légué des bâtiments disgracieux qui défigurent une grand nombre de villes de France, petites, moyennes ou grandes. Il serait regrettable que notre génération répète les erreurs du passé par une application aveugle et excessive de l’idée de densification du tissu urbain, qui au départ contient une intention louable.

Le projet de logements sociaux rue de Kermorvan me semble être un exemple d’une telle application excessive de l’esprit de la loi, avec comme conséquence une mauvaise insertion dans l’environnement.

Je vous remercie de bien vouloir diffuser ce courrier auprès des conseillers municipaux.

Sincères salutations,

Claude Godrèche